Zoomania, ou l’animalité et l’humanité en question

Publié le par art-tic

C’est à la Condition Publique de Roubaix – ancien lieu dédié au conditionnement de la laine – que l’artiste Suisse Christian Gonzenbach expose jusqu'au 27 Mars près de 15 de ses œuvres. Artiste plasticien, vidéaste, photographe… Gonzenbach parle de son travail en ces termes : « j’emploie un vocabulaire qui semble familier mais étrangement décalé ». Et pour cause. Tour à tour amusantes, surprenantes, décalées et grinçantes, les œuvres proposées dans l’exposition Zoomania nous amène à nous questionner sur le rapport entre l’homme et le monde animal.

 

L’exposition s’organise en deux temps : le Zoo, lieu de rencontre en l’homme et l’animal et le Muséum, espace dédié à l’animal inerte.

Le zoo ne présente qu’une seule œuvre, mais qui se suffit à elle-même tant elle pousse à réfléchir. En effet, le sursis, œuvre produite insitu par l’artiste, met en scène trois agneaux, sortis de la filière agroalimentaire le temps de goûter à la joie d’accueil d’un zoo. Toute personne un tant soit peu sensible ne peut résister aux bêlements de l’animal, en se demandant quelle sera son avenir une fois l’exposition terminée. Dès cette première œuvre, le ton est donné : nos habitudes de consommation vont être interrogées, d’une manière parfois dérangeante.

 

 

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Le Muséum prend place dans le Hall B, dont l’éclairage est pour l’occasion tamisé, ne mettant l’accent que sur ce qui n’apparait encore que comme des formes étranges. C’est alors qu’on découvre une impressionnante structure de bois, Life Size. Cette maquette à échelle réelle d’une baleine nous rappelle notre petitesse comparée à certaines espèces. Mais si l’on se souvient que les baleines sont une espèce en voie de disparation, alors devant cette grandeur, chacun se retrouve face à sa conscience. Comment l’homme, si petit, peut-il faire disparaitre un si grand animal ?

Puis l’œil est attiré vers un charmant lapin géant, qui donne envie de se blottir contre lui. Seulement, après lecture de l’explication, nous apprenons qu’il a été réalisé avec pas moins de 650 vraies peaux de lapins. De quoi en refroidir plus d’un.

 

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Vient ensuite une courte vidéo, amusante et surprenante. Une poule et un renard sont mis en scène, dans une sorte de danse nuptiale, avant de retirer leur peau et de se les échanger. La poule devient renard, le renard devient la poule. Mais comment envisager une poule dans un corps de renard ?

Le parcours se poursuit, proposant des œuvres réalisées avec des matériaux pour le moins surprenant : des silex, conçus avec de la gomme, viennent contraster avec le matériau original, la pierre, en rappelant que ce sont les silex eux-mêmes, qui, par la main de l’homme, ont contribué à la disparition de certaines espèces, comme les mammouths. Les Xuamina, animaux taxidermisés à l’envers, deviennent des entités inédites, sans leur poil. Ces poils qui sont si souvent associés à la notion d’animalité, en opposition à l’homme, qui cherche la plupart du temps à se débarrasser de sa pilosité. Un homme imberbe est-il un homme qui se débarrasse de son animalité ?

 

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Les œuvres interpellent, comme notamment ce blaireau, Le petit homme (2008), dressé sur ses pattes arrières et tenant une lance. Quels sont les capacités des animaux ? Une révolte serait-elle possible ?

Le ton de l’artiste se veut humoristique. Oui, mais cela pour mieux créer le questionnement dans l’esprit du spectateur, qui ne peut rester indifférent à tant de suggestions quant au monde animal dans son rapport avec celui de l’homme. La domination humaine, qui s’étend sur des domaines aussi bien technologiques que scientifiques, ne se fait-elle pas trop souvent au dépend du milieu animal ? Leur survie fragile nous rappelle que notre propre condition n’est pas à l’abri de déboires liés à la société dans laquelle nous vivons…

 

Photo 1: Les Xuamina, 2008/2010, animaux taxidermisés à l'envers

Photo 2: Great Stuffed Rabbit, 2006, lapin empaillé réalisé avec 650 vraies peaux de lapins

Photo 3: Le petit Homme, 2008, squelette de blaireau

 

Zoomania, à la Condition Publique de Roubaix jusqu'au 27 Mars

http://www.laconditionpublique.com/


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